La goélette Suzanne dessinée par William Fife

Suzanne en 1910

Suzanne fut toujours connue pour son allure et, sous nos yeux, se trouvent combinés toute la grâce que l’architecte Fife et le gréement de goélette pouvaient apporter à un bateau. Elle fut construite au rating linéaire de 79,07 par A.& J.Inglis, à Glasgow, en 1904, pour un propriétaire allemand M.O. Huldschinsky, de Kiel. Elle courait dans la grande classe à handicap, et bien que son palmarès ne semble pas avoir été spécialement brillant, on sent qu’elle fut toujours un bateau spectaculaire. En fait, elle gagna quand même au handicap la Coupe de l’Empereur d’Allemagne en 1905, de Douvres à Heligoland. La photographie fut prise en 1910, quand Suzanne avait été reclassée comme un 23 Mètres de la Jauge Internationale, mais à cette époque, pour la course, le gréement de goélette avait cédé la place à celui de côtre. Néanmoins, la puissance fantastique du gréement de la goélette au largue, accentué encore par le grand foc ballon établi entre les mâts et bordé sur la bôme de grand-voile, est clairement illustré ici.

En 1925, on pouvait encore voir Suzanne entre les mains de Robert MacAlpine Junior, et on peut dire qu’elle eut une vie glorieuse et mit en valeur la scène du yachting par son rayonnement presque féminin.

The schooner ‘Suzanne’ under sail, 1911. Creator: Kirk & Sons of Cowes.

Sur cette image, la goélette file au près « un os entre les dents ». La voilure est parfaitement établie et chaque voile porte à merveille. Toutes les voiles de près sont en place: foc, clin-foc, trinquette, misaine et son flèche, grand-voile surmontée de son grand-flèche, sans oublier une voile d’étai établie entre le grand-mât et le mât de misaine!

The schooner ‘Suzanne’ under sail, 1911. Creator: Kirk & Sons of Cowes.

Cet agrandissement permet d’admirer la beauté du dessin de l’étrave en cuillère ainsi que la courbure magnifique de la tonture: seul William Fife JR avait ce coup de crayon!

CICELY dessinée par William FIFE en 1902

CICELY 1908

CICELY fut dessinée par Fife et construite par J. & G. Faye et Co., à Southampton en 1902, pour Cecil Quentin. Elle était contemporaine de la goélette Météor III dessinée pour le kaiser en Amérique. Aucun de ces yachts n’était strictement un yacht de course suivant la définition de l’époque: les deux étaient conçus comme des croiseurs rapides; néanmoins, ils étaient des bateaux magnifiques et inévitablement impliqués dans la compétition. Cicely étalait 929 m2 de voile et avait un rating linéaire de 95,67. Elle rencontra pour la première fois Météor III ( 36,57 m de flottaison, 8,22 m de largeur et 4,57 m de tirant d’eau) dans les eaux allemandes et se révéla de loin le meilleur bateau des deux, en particulier contre le vent. Cette photographie, prise six années après sa construction, la montre dans des conditions où elle était sous son meilleur jour et à une allure où elle excellait. Les commentaires de l’époque la décrivent comme « un bâtiment tout à fait remarquable et pointant étonnamment haut dans le vent pour une goélette ».

Pour sa première saison en 1902, elle courut dans la Baltique en compagnie du troisième Météor, de Clara, Lasca, Iduna, et Nordwest – la fine fleur de la flotte des goélettes. Elle gagna chacune de ces courses. Avec la nouvelle règle internationale de 1906, elle devint un 26,35 m et de ce fait, se trouva qualifiée pour la classe supérieure et continua à courir au handicap. Bien que durement pénalisée par la Jauge, elle gagna de nombreuses courses: entre autres, deux fois la Coupe de l’Empereur, un Jubilee Challenge Trophy et établit un nouveau record Douvres-Ostende.

WATERWITCH

WATERWITCH 1911

Waterwitch était un dessin de Fife pour Cecil Whitaker et construit par Ailsa S.B. Co.,à Troon, dans le Ayrshire, en 1911. Cela dit, son histoire est courte pour ne pas dire plus. Sur la photo, elle est toute grâce et puissance et montre toutes les caractéristiques d’une goélette de première classe. Cependant, le fait demeurequ’elle courut seulement une saison? Aussi étonnant que cela paraisse, elle fut alors démolie – envoyée aux ferrailleurs, comme vous voudrez. Mais pas complètement ! Son gréement et le reste de l’équipement furent transférés sur le nouveau yacht de Whitaker, Margherita, de 380 tonnes, mais celui-là dessiné et construit par Nicholson.

Rainbow

Rainbow 1898

Cette photographie exceptionnelle, pleine de grâce et de puissance, de Rainbow au près serré en course devant Cowes par belle brise, fut prise au mois d’août de sa première saison de navigation.

Rainbow était un plan de G.L. Watson, construit par D. & W. Henderson à Glasgow, en 1898, pour C.L. Orr Ewing, membre du Parlement.

A la vérité, il n’a pas été dessiné comme un yacht de compétition et son rating linéaire de 114,53 ne lui rendait pas les choses plus faciles pour gagner les courses, une fois la correction de temps faite. Mais il étalait une très large surface de voilure, 1255 m2 et, dans ses bons jours, il pouvait faire de belles démonstrations de vitesse. Sur le parcours de la reine du Royal Yacht Squadron, avec peu de près serré ce jour-là, il parcourut les 50 milles en 3 heures  52 minutes et 46 secondes. Plus tard, son rating s’établit à 30,59 suivant la nouvelle jauge internationale.

En 1904, il passa dans les mains du Verin Seepapt Hamburg et reçu le nom de Hamburg. En 1905, lors de la course de la Kaiser’s Cup, Hamburg arrivera en seconde position au cap Lizard, 23 heures après la goélette Atlantic, laquelle gardera près de 100 ans le record de la traversée entre Sandy Hook et le cap Lizard.

Rainbow au largue

Sur cette autre photographie de Rainbow, prise en 1898, on peut apprécier la puissance du gréement de goélette aux allures portantes. On notera la présence d’un pavois relativement important, comme on les rencontre sur les voiliers de croisière, mais cela ne nuit en rien à la beauté de la ligne de pont. Par ailleurs l’observation du poste de barre nous fait découvrir avec étonnement la présence d’une barre franche et non d’une roue de gouvernail, ce qui semblerait plus logique sur un yacht de cette taille.

Cetonia

CETONIA

Une première goélette Cetonia avait été construite par Ratsey avec une jauge de 203 tonnes T.M., en 1873. Elle figure dans le Lloyd’s Yacht Register jusqu’en 1906, date à laquelle un autre joli yacht du même nom, et appartenant également à Lord Iveagh fit son apparition. Ce second yacht est celui que nous regardons maintenant.

Il avait été construit sur le plan de J.M.Soper par Camper & Nicholson à Gosport en 1902, pour Mr. S.M. Singer de New York. Le plan original comportait 609,86 m2 de voilure, qui furent portés à 929,03 m2, et plus tard encore à 1.021,93 m2 avec un rating linéaire de 95,30. Lord Iveagh l’acheta à Mr. Singer en 1906 et il était encore entre ses mains en 1915.

La longévité de plus d’un de ces bateaux des grands jours du yachting, et la fidélité de leur propriétaire sont surprenantes. John Scott Hughes écrivit que « de toutes les choses façonnées par la main de l’homme, peut-être était-ce un bateau qui venait le plus près de son cœur ». On se souvient d’Arrow, Fiona, Bloodhound – et naturellement Britannia. Les Les Cetonia doivent avoir été des bateaux de ce genre. Lord Iveagh conserva le premier, et le second, en comptant les années de guerre, resta dans des mains pendant 16 ans avant d’être vendu à Mr. Gilbert A. Tonge. Mais en parlant de longévité, nous avons une photographie de Cetonia faite en 1930, appartenant à Lord Stalbridge et gréée en goélette trois mâts à voiles d’étai. Cetonia apparaît encore au Lloyd’s en 1939.

Cétonia n’était pas un brillant yacht de course, mais c’était un superbe bateau de croisière dans le grand style. Et voici une curieuse note d’histoire, et un commentaire sur notre temps : en 1934, elle apparaît dans une annonce de courtier, offerte au prix de 4.000 Livres de l’époque.

Cetonia gréée en trois mâts goélette à voiles d’étais.

Cetonia file au largue vers l’est, au large de Old Castle Point à Cowes. La brise de suroît donne à penser